Randonnée Aquatique
sur
l’EURE
Dimanche 24 octobre 1999
récit vécu par Gérard Legrand

Ils arrivent ces nageurs ?

La fine poussière blanche commençait à envahir le garage et la caisse à poisson se métamorphosait rapidement en planche de natation aux formes douces et arrondies. Il était l’heure et la belle auxiliaire se contenterait des dernières formes du moment. Le sac fut préparé ensuite, pas besoin de couteau, ni de profondimètre, par-contre deux paires de gants, les palmes de fond, un bon collant, la bouteille d’eau de feu, un dernier tour, tout est bien prêt. La météo l’avait promis ce serait la tempête , du vent , de la pluie, la matinée serait rude.

Les barres bleutées du toit de la Mégane de Jean-Luc semblent lumineuses dans la demi clarté du petit jour et les sacs sont rapidement empilés dans le coffre. Michel nous attend déjà au pied de son immeuble suivi des deux petites nouvelles qui avaient réussi à s’échapper de leur lit douillet pour aller baigner dans l’eau présumée froide et glacée. Le travail du mercredi soir avait payé : elles allaient goûter aux joies de la descente de rivière automnale.

Le convoi s’engage bientôt sur la N12, après avoir croisé la sombre saignée de la déviation dans la colline de Ponchartrain. La route sans histoire nous mène vite sur la place principale de Chérisy, point de rendez-vous de ce matin automnal. C’est le jour du marché qui nous propose ses étals colorés et son sens interdit qu’il faut contourner, mais , ce n’est pas le but ! nous cherchons la rivière. Les courageux se réunissent bientôt et la Clio de Corinne a quelques émotions sous la caresse agressive du rétro de le voiture de Myriam et Stéphane. Une chance qu’il n’y ait pas de verglas…

Le lavoir aurait pu être un confortable vestiaire, mais, il sert seulement à expliquer à Florent la raison et l’utilité des vis et volants qui encadrent les plates-formes qui le bordent du côté rivière. Les " Vieux " ayant statué, ce ne sera ni le point de départ, ni celui d’arrivée, départ en voiture vers le départ ! Après quelques hésitations nous rejoignons Michel, parti en trombe. Il est arrêté au pont d ’Ecluselle, lieu de la fin de nos exploits. Un peu d’hésitation dans la logistique et nous nous transmutons en grenouilles colorées avant de remonter dans les voitures. Corinne décline l’offre d’utiliser la cabine de déshabillage de France-Télécom mise à sa disposition, la transparence de l’idée n’est pas trop à son goût…

Nous reprenons la route, emballés dans nos étuis de Néoprène et rejoignons le lavoir de départ ou Michel, parti en trombe, est installé dans la prairie verte qui jouxte le lavoir, d’où nous nous lancerons dans l’eau glauque. Finalement nous sommes 15 à nous jeter dans l’onde et 4 supportrices nous soutiennent moralement. Nous ne sommes pas les seuls sur le site mais serons les plus rapides à nous jeter dans l’eau, tous munis de nos accessoires de nage, la planche décorée de Nassim, la bicolore de Gilbert, la caisse à saumon raplatie de Gérard, l’hydrospeed de Corinne , le cubi de pinard vide et regonflé du caresseur de rétro, et même rien du tout pour le courageux Stéphane. Avant le départ, Petit tour à contre courant sous le pont pour chauffer les mollets et, en nage.

La suite pourrait s’appeler palmeurs, palmons, palmez ! à travers la campagne, au raz de l’eau un peu trop glauque et odorante à notre goût. La tête de deux oies sauvages dépasse de la rive, un cheval semble interrogatif devant ces humains gainés de noir, de rouge de bleu qui glissent dans l’eau dans des éclats de rire et le battement régulier des palmes même les bouteilles de plastique se cachent de honte sous la végétation des bords. Les rives défilent et quelques rafales plient le sommet des grands arbres sans trop de remous en surface, la tempête semble être restée dans le crâne des météorologistes de la TV, l’eau ne semble pas trop froide et l’effort soutenu laisse les corps à l’abri de l’onde fraîche, sa température serait supérieure à celle de Carantec aux dires des " Vieux " et avoisiner les 11,5°C d’après le thermomètre de la montre de Nassim.

Au fil des méandres un grondement sourd augmente et une construction métallique surplombe des murs et des portes. L’une d’entre elles est ouverte et le flot s’engouffre dans le mince espace en plongeant deux mètres plus bas dans un bassin bouillonnant rempli de débris divers à sa périphérie. Nos guides reconnaissent le terrain, Michel monte sur la passerelle, prêt à se jeter à l’eau en cas de difficulté. " Tenez bien la tête au raz de l’eau sinon vous aurez des bosses , et palmez tout le temps" lance Jean-Luc avant de s’élancer en premier suivi de près par Daniel pour garantir la sécurité. Tout le monde passe dans l’entonnoir en retenant son souffle, tête basse. Tout le monde se regroupe dans le bassin de réception et Jean-Luc regrette déjà de ne pas avoir de partie gratuite….mais il faut repartir. La partie suivante réserve une zone à souvenirs bleuissants et même en la faisant jambes tendues et ventre plat, ça racle et quelques pas debout nous dégagent et nous éloignent.

L’accueil est triomphal au premier point de rencontre avec nos angéliques gardiennes Mimi, Hélène, Laëtitia et Justine. Pit stop dans les stands avec petits bonbons, petites gouttes pour les autres et rien pour Michel qui traînait et n’a même pas un sucre à mouiller. Rendez-vous est pris pour le pont suivant. Daniel et Jean-Luc s’en vont en solitaires et se tapent la discute, ils dérangent plusieurs colonies de canards sauvages qui s’arrachent lourdement de l’eau dans un fouettement soyeux de l’air. Une cane reste cachée, leur échappe et sera débusquée par Yves et Gérard. Au pont suivant, pas d’accueil mais une compagnie de marcheurs qui nos souhaitent le bonjour et semblent étonnés de voir ces épaves colorées qui dérivent en plaisantant bruyamment. Nos deux fuyards nous attendent à une bifurcation pour regroupement. Stéphane saute sur la rive et déleste sa vessie dilatée. Alain prend un bain d’orties et contemple les arrivants façon Récamier. Un dernier remontant et le palmage reprend avant l’arrivée des frissons. Les mollets sont plus durs, les reins se cambrent et les mains se crispent un peu plus sur les flotteurs. La rive murée d’Ecluselle apparaît et nos maîtresses nageuses sont bien là enfin pour nous bloquer sous le pont.

Tout le monde a bien rejoint la rive, les baigneurs remontent et s’étalent désormais sur les parkings de chaque coté du pont. Il y en même deux qui se sentant bien dans leur combi se dorent aux timides rayons de soleil jusqu’à ce que leurs affaires sèches reviennent. Les passagers des voitures qui passent sont étonnés de voir sur le parking ces corps dénudés qui s’agitent à essayer de remettre une chaussette sèche sur un pied humide, ou récupérer une tranche de pain d’épice trempée tombée dans le café fumant, bref la troupe s’organise et bientôt est prête à repartir vers le bistrot de Chérisy ou un pot nous récompensera de nos efforts. Les petits nouveaux sont convaincus ils seront partants à la prochaine ! Les "Vieux ", eux, sont déjà convaincus et les absents ne pourrons que regretter cette belle matinée organisée sous la houlette de Michel et Jean-luc que nous remercions chaleureusement.

Gérard Legrand 24 novembre 99

Félicitations aux 7 petits " nouveaux " qui n’ont pas hésité à mouiller leur combi dans l’aventure,6 sont des petits nouveaux (apprentis N1) Isabelle, Patricia, Myriam, Stéphane, Pierre-Xavier, Gilbert, quant à Yves (N4I) il n'en n'est pas à son baptême…Mention spéciale à Florent qui, bien que né en 88, a nagé dans le bonheur…

Nous sommes descendus de Villemeux à Ecluzelles et cela nous a pris 1H30 de pur plaisir.